samedi 2 septembre 2017

"L'ingrédient secret du bonheur" de Laurel Remington.

Scarlett est une collégienne pas tout à fait comme les autres; sa mère, une blogueuse très tendance, s'est rendue célèbre grâce aux billets publiés sur la vie de sa fille. Toute sa vie est étalée sur Internet mais le pire, c'est que tout le monde au collège, ou dans son quartier, sait qui est la célèbre blogueuse et, surtout, qui est la fille dont elle parle une fois par semaine! Scarlett, humiliée de voir sa vie ainsi déballée au grand jour, s'est peu à peu refermée sur elle-même. Elle n'a plus d'amis, elle ne fait plus aucune activité extra-scolaire, elle ne parle plus à sa mère, bref, elle essaye par tous les moyens de donner le moins de matière possible à sa mère. Elle est triste et se sent très seule, forcément. Pourtant, un jour, tout va changer grâce à une mamie hospitalisée, un chat affamé, une cuisine fabuleuse, et un livre de cuisine fantastique! 

Attention, ce livre va vous donner des envies de gâteaux et aussi de vous mettre aux fourneaux! Bien écrit, bien mené, Laurel Remington qui publie là son premier roman, traite d'un sujet très actuel, avec talent. On s'attache vite aux personnages qui paraissent d'abord assez caricaturaux mais dont on découvre bien vite les failles, et on prend plaisir à suivre l'évolution de Scarlett. Trouvera-t'elle l'ingrédient secret du bonheur grâce à la cuisine? Une lecture très accessible et pleine de surprises, sur l'entraide, le partage et la transmission, qui se dévore dès 10 ans.

L'ingrédient secret du bonheur, Laurel Remington, Casterman, 2017 
(322 pages)

★★★★☆

lundi 17 juillet 2017

"La Guerre de Catherine" de Julia Billet et Claire Fauvel

Adaptation du roman éponyme de Julia Billet qui s'est elle-même inspirée de l'histoire de sa mère, cette bande dessinée est une réussite! L'histoire se déroule pendant la seconde guerre mondiale et on suit la vie d'une adolescente, Rachel Cohen, passionnée de photographie et hébergée dans un pensionnat près de Paris. Rachel est juive et, comme beaucoup d'autres enfants du pensionnat, elle n'est plus en sécurité. Aidés par le réseau de la résistance, les enfants vont être dispersés dans divers endroits de France et sous de fausses identités. Rachel, qui s'appelle dorénavant Catherine Colin, va ainsi passer d'une école catholique, à la ferme d'un couple de résistants, sillonnant la France toujours plus loin pour fuir les rafles allemandes. Au fil de ses voyages et de ses rencontres, Catherine grandit, tout en continuant de prendre des photos des gens qu'elle croise sur sa route. Témoignages d'une époque, ses photos sont aussi un filtre qui lui permettent de tenir la sombre réalité un peu à l'écart. Son talent s'affirme et jamais elle ne perd l'espoir de retrouver un jour ses parents qu'elle n'a pas revu depuis le début de la guerre.
    

J'avais lu des critiques élogieuses lors de la sortie du roman de Julia Billet malheureusement je n'ai jamais pris le temps de le lire. C'est donc une vraie belle découverte pour moi! Le format permet de mettre à portée de tous cette histoire forte et touchante qui rend surtout hommage à l'entraide et au courage des hommes et des femmes qui ont refusé d'obéir en dénonçant les juifs et les ont aidé. Avec son trait léger et ses couleurs lumineuses, Claire Fauvel, l'illustratrice, apporte une belle douceur à cette histoire. Une histoire bouleversante à découvrir absolument!

La Guerre de Catherine, Julia Billet et Claire Fauvel, Rue de Sèvres, 2017

jeudi 13 avril 2017

"Je suis ton soleil", de Marie Pavlenko

Déborah vit à paris avec son père, un rédacteur en chef surbooké, et sa mère, une femme plutôt distante et qu'elle sent s'éloigner de plus en plus. Elle s'apprête à rentrer en terminale. Elle croit à la théorie de la scoumoune qu'elle a pu tester à de nombreuses reprises : d'ailleurs, le théorème de la scoumoune a encore frappé en ce jour de rentrée des classes puisque Isidore, son "chien-clochard", lui a mangé sa dernière paire de chaussures. Malgré ce fameux théorème et le bac en ligne de mire, Déborah espère passer une bonne année. Elle déchante un peu lorsqu'elle apprend qu'elle n'est pas dans la classe de sa meilleure amie Éloïse; pire, elle se retrouve avec la peste du lycée, Tania, et un garçon bizarre, passionné par les araignées, qu'elle et Éloïse ont surnommé Mygaleman. Il y a aussi un petit nouveau, Victor, qui ne la laisse pas indifférente... Cette année, sera en fait l'année du changement pour Déborah, et même de grands bouleversements: sa meilleure amie n'a plus d'yeux que pour son nouveau mec et Déborah ne la voit presque plus, surtout, elle surprend son père dans les bras d'une autre femme. Effondrée, elle trouve du réconfort dans d'inattendus nouveaux amis : Jamal, alias Mygaleman, et le beau Victor. Entre rires et pleurs, euphorie et désespoir, Déborah va vivre une année en forme de montagnes russes et notre pauvre cœur de lecteur va être bien mal mené lui aussi!

Attention, gros gros GROS coup de cœur pour ce fantastique roman!  Aussi à l'aise lorsqu'il s'agit d'aborder des sujets graves (comme le suicide ou l'avortement) que des thèmes plus légers, Marie Pavlenko, qui a mis plusieurs années avant de terminer ce roman, m'a touchée en plein cœur. Grâce à des personnages forts et touchants, notamment celui de Déborah, qui ne perd jamais son sens de l'humour, le roman atteint une vraie densité. Marie Pavlenko signe une très belle histoire sur l'adolescence, cette période si riche en émotions qui chamboulent toute notre vie. Ici, point de romance gnian-gnian à l'eau de rose, se sont surtout l'amitié et l'entraide qui sont au cœur de cette histoire. Sans jamais tomber dans la démonstration, l'auteur nous parle avec subtilité de l'amour, celui qu'on ressent pour ses parents, pour nos amis ou pour une personne en particulier. L'amour filial ou l'amour sans retour, celui qui se termine ou celui qui grandit. Tout cela toujours dans la légèreté et ponctué de passages hilarants (j'ai particulièrement apprécié la rencontre entre Déborah et Gertrude la mygale ou encore celui où elle teste le yoga avec sa mère!) Un page turner aussi désopilant qu'émouvant, qui se dévore en quelques heures ou plus, si on veut faire durer le plaisir!

"La prof arrive et, comment dire... Je suis face à un hobbit affublé de jambières rose bonbon. Frodo avec une perruque et une tenue sportive moulax.
Et vas-y que je tends la jambe, que je la fais passer sous mon aisselle et ressortir sous le menton, que j'inspire hiiiiiiiiiiiin, que j'expire pffffffffffff. Et on enchaîne : la position du héron ventripotent, le mulot crucifié, le bouc unijambiste. Oui, c'est bien, ton mollet doit entrer en fusion avec ton esprit. C'est bon pour ton karma. 
J'aime ma mère, j'essaie d'adopter un visage neutre, voire encourageant, mais la vérité est simple : le yoga, ce n'est pas pour moi."  

Je suis ton soleil, Marie Pavlenko, Flammarion jeunesse, 2017
(466 pages) 

 

vendredi 3 mars 2017

"Scarlett Epstein rate sa vie", de Anna Breslaw

Le jour où Scarlett apprend que sa série préférée se termine, c'est tout son monde qui s'effondre! Star dans son domaine, la fanfiction inspirée de sa série fétiche, Scarlett ressent un grand vide et ne sait plus quoi écrire. Grâce aux encouragements de sa communauté, elle décide finalement de se lancer dans l'écriture de la suite de la série. Le problème c'est que contrairement à sa vie virtuelle, elle trouve que sa "real life" manque cruellement d'intérêt, voire même est assez loin d'être une vie de rêve. Son père est parti et vit à New-York avec sa nouvelle famille laissant Scarlett seule avec sa mère qui enchaîne les conquêtes et a bien du mal à tenir son rôle de mère. Heureusement, il y a ses amis, ceux du web mais aussi Avery, sa "best friend", et surtout Ruth, sa voisine de 73 ans, qui fume des joints à longueur de journée et incite Scarlett à sortir de sa coquille. Pour Scarlett, ceci n'est d'ailleurs pas une mince affaire, en dehors de sa copine Avery, elle trouve les élèves de son lycée sans intérêt, en particulier la bande des "populaires", qui sont des clichés ambulants! D'autant plus que son ancien meilleur ami pour qui elle en pince en secret, fait désormais partie de leur bande!

Certes, résumé ainsi, ce roman destiné aux ados, n'a rien de vraiment nouveau du point de vu de l'intrigue. Je n'ai d'ailleurs pas pu m'empêcher de penser à Fangirl de Rainbow Rowell. Pourtant, j'ai eu plaisir à suivre les aventures de cette héroïne attachante à travers son regard aiguisé. Souvent critique envers ses paires mais aussi à l'égard des adultes, (le milieu littéraire de Greenwich village en prend pour son grade) Scarlett n'a pas la langue dans sa poche. C'est distrayant, drôle et pas du tout cucul. Scarlett Epstein rate sa vie raconte le parcours d'une adolescente qui se cherche et se transforme grâce à ses rencontres notamment celle de Ruth, personnage très touchant qui apporte à mon sens le plus de profondeur à l'histoire. Grâce à elle, Scarlett change et devient moins amère. Beaucoup de choses sont traitées dans ce roman, les relations familiales chaotiques, l'amitié, l'amour, ou encore les passions qui enrichissent la vie, surtout la littérature. Le mode de narration à la première personne rend la lecture simple et dynamique. C'est un roman qui va à l'essentiel et plaira aux adolescentes par son ton enlevé et sa fraîcheur. Un premier roman qui tient ses promesses!

Scarlett Epstein rate sa vie, Anna Breslaw, Gallimard jeunesse, "Scripto", 2017 (320 pages)
★★★☆☆

jeudi 9 février 2017

"Sauveur et fils" de Marie-Aude Murail



Si vous connaissez et appréciez la série En analyse (ou In treatment) avec Gabriel Byrne, vous aimerez très certainement Sauveur et fils de Marie-Aude Murail
           
Dans ce roman, nous suivons en effet l'histoire d'un psychologue clinicien, Sauveur Saint-Yves, qui est aussi père célibataire et vit à Orléans. Ses journées sont rythmées par les visites de ses patients et par son fils de 8 ans, Lazare. Celui-ci écoute d'ailleurs régulièrement en cachette, et sans trop bien comprendre, les séances de Sauveur. Et on en voit défiler des gens dans ce cabinet! De l'adolescente adepte de la scarification à la famille recomposée et homoparentale en passant par une fillette qui préfèrerait être un garçon, tout comme Lazare on suit la vie de ces personnes avec un intérêt grandissant. Chez Sauveur et fils, la vie suivrait donc son petit bonhomme de chemin si de curieux évènements ne se produisaient depuis quelques temps autour de la maison. Évènements qui vont d'ailleurs obliger Sauveur à révéler certains pans de son histoire à son fils et à lever le voile sur la mère de Lazare que celui-ci n'a jamais connu.
    
Marie-Aude Murail signe là un premier tome (ou première saison) tout à fait réussi! Avec un humour parfois grinçant et beaucoup de subtilité et de justesse, elle évoque des sujets difficiles à travers les portraits de ces patients : suicide, homosexualité, racisme, folie ... Toujours très à l'aise pour créer des personnages attachants et hauts en couleurs, Marie-Aude Murail est aussi fine psychologue. Maîtrisant les nuances et la complexité des relations humaines elle nous accroche immanquablement avec cette série où l'action se déroulent essentiellement... dans le cerveau humain! C'est donc avec plaisir que j'ai retrouvé Sauveur et sa bande (tellement charmant que s'il existait j'irai le consulter tout de suite), dans le tome 2! Marie-Aude Murail y parle toujours de la famille et des détresses de l'adolescence, on y retrouve aussi certains des patients de la saison 1 et bien entendu, des hamsters! Pas du tout déçue par ce nouvel opus, bien que l'effet de (bonne) surprise soit un peu passé,  je ne manquerai certainement pas de  lire la saison 3 qui sort au mois de mars!

Sauveur et fils, Marie-Aude Murail, Ecole des loisirs, 2016 

mardi 17 janvier 2017

"Le jour où le bus est reparti sans elle", de Beka, Marko et Cosson

Clémentine est un peu perdue. Sans trop savoir pourquoi, elle ressent un grand vide dans sa vie. Pour tenter de soigner son mal-être, elle décide de s'inscrire à un week-end de méditation qu'organise un maître réputé. Le jour du départ, Clémentine se sent pourtant assez mal à l'aise dans ce groupe de méditation auquel elle n'a pas l'impression d'appartenir. C'est lors d'une halte dans une petite épicerie bio installée au bord d'une route en pleine forêt, que le bus et le groupe de méditation repartent sans la jeune femme. Malchance ou chance? Les circonstances font que Clémentine va lier connaissance avec le gérant de l'épicerie et apprendre beaucoup à ses côtés lors de ce week-end imprévu et placé sous le signe de la sérénité, de l'amitié et du bien-être.
        
Voilà une bande-dessinée qui fait un bien fou! On suit Clémentine, une jeune femme d'aujourd'hui, qui sans être malheureuse, cherche un sens à sa vie et manque de confiance en elle. Grâce à cet homme rencontré au hasard, elle va comprendre une chose essentielle pour continuer d'avancer, c'est que tout dépend d'elle. Avec un graphisme apaisant, lignes douces et couleurs pastelles, cette histoire simple, ponctuée de quelques contes zen, constitue une bonne première approche de la sagesse zen. Cette BD décomplexante, nous enseigne qu'il n'est pas forcément utile de s'imposer des contraintes pour méditer et se sentir bien, comme se lever à l'aube pour faire la salutation au soleil; parfois, il suffit juste de faire quelque chose qui nous fait du bien. Lire, écrire, dessiner, cuisiner, se promener... ces petites choses suffisent souvent pour se sentir mieux, profiter du moment présent, avoir conscience de ce qui nous entoure, et savoir qui nous sommes.
   
      
"Surtout n'aie pas peur! Il n'y a aucune raison d'avoir peur! Choisis ton chemin et suis le en savourant tous les petits bonheurs simples qu'il va régulièrement te proposer. La vie n'est qu'un livre rempli de réponses. C'est sans fin..."

Le jour où le bus est reparti sans elle : tome 1, Beka, Marko et Cosson, Bamboo éditions, 2016
70 pages
★★★★☆ 

mardi 10 janvier 2017

"L'Echappée", de Allan Stratton

Leslie a 15 ans et accumule les problèmes au lycée comme à la maison, où elle vit seule avec sa mère depuis le divorce de ses parents. De plus, l'ambiance n'est pas au beau fixe avec sa meilleure amie maintenant que celle-ci traîne avec d'autres filles. Un jour, pour se rendre intéressante devant elles, Leslie se met au défi d'aller parler à Jason, le nouveau du lycée, sur qui fantasment ses camarades. Elle ne se doute malheureusement pas de la tournure que va prendre ce geste.
 
Première publication en 2000, réécrit en 2008 et publié pour la première fois en France en 2016, L'Echappée, raconte l'histoire d'un amour toxique puisque Leslie va être victime d'un manipulateur pervers et violent. D'abord charmant quoique un peu directif, Jason se révèle être le profil type de ce qu'on appelle communément "un pervers narcissique".
Mais il s'agit du premier amour de Leslie et celle-ci manque d'expérience pour se rendre compte que ce qu'il lui inflige n'est pas normal et n'est surtout pas de l'amour. Peu à peu, la toile que tisse Jason autour de Leslie, la coupe de sa mère et de ses amies. De plus en plus isolée, Leslie ne sait plus ce qui est bien ou mal, jusqu'à l'acte de trop qui va la faire réagir de justesse.
  
Très bien menée, la première partie du roman, écrite à la première personne à la manière d'un journal intime, se centre plutôt sur les problèmes ordinaires de Leslie. On comprend ainsi ce qui l'a rend si vulnérable. Dans la seconde partie, le récit s'accélère et on assiste au processus mis en place petit à petit par Jason visant à faire de Leslie son objet.  L'auteur brosse avec brio le portrait de l'adolescente en proie à la confusion des sentiments. Amour, doutes, honte, peur, solitude, colère... Allan Stratton montre à quel point il peut-être difficile et long de sortir de l'engrenage, de voir la vérité en face.

Efficace et concis, avec un côté thriller, ce roman se lit d'une traite, et à le mérite de parler d'un sujet difficile, peu abordé en littérature jeunesse. A lire et à faire lire.

L'Echappée, Allan Stratton, Milan, 2016
250 pages 
★★★☆☆

mercredi 4 janvier 2017

"Les Culottées", de Pénélope Bagieu

Je ne pouvais pas passer à côté de la dernière bande-dessinée de Pénélope Bagieu, talentueuse auteure-illustratrice que j'ai découvert il y a quelques années grâce à son blog "Ma vie est tout à fait fascinante"! D'ailleurs, je crois bien que celle-ci est ma préférée. A l'origine, les Culottées était un blog que Pénélope Bagieu a tenu du 11 janvier au 26 octobre 2016 où elle racontait, chaque semaine et en dessins, la vie de femmes connues ou injustement méconnues, aux destins hors normes. La sortie en BD apporte à ces histoires épatantes un merveilleux écrin.

De Agnodice, la première femme gynécologue à Leymah Gbowee, travailleuse sociale, en passant par Annette Kellerman, nageuse et inventrice du maillot de bain, ou Margaret Hamilton, actrice spécialisée dans les rôles de méchante, ces quinze portraits nous font voyager à travers les âges et les continents. Rassemblées grâce à Pénélope Bagieu, ces femmes qui ont toutes été animées par un désir d'indépendance et de liberté sans pour autant se revendiquées militantes, sont des exemples d'audace et de modernité. Elles n'ont pourtant rien en commun hormis une avide soif de changement!

L'air de rien, cette BD nous apprend plein de choses! Et grâce aux dessins plein d'humour, à une mise en scène dynamique et aux traits d'esprits de l'auteure toujours bien amenés, on reste scotché du début à la fin! Heureusement, le tome 2 paraît très bientôt!
    

Une bande-dessinée à mettre entre toutes les mains: petits ou grands, femmes et hommes!

Les Culottées, Pénélope Bagieu, Gallimard, 2016
(144 pages)